Dans le clair-obscur - Le théâtre de Jon Fosse
La création de Quelqu'un va venir par Claude Régy, en 1999, au Théâtre des Amandiers a été audacieuse. Une pièce en provenance de la Scandinavie septentrionale a vu s'infliger un traitement de choc, une transformation profonde. Censée durer à peine une heure trente, la performance durait ici presque le double. L'œuvre semblait disparaître derrière les dialogues tirés en longueur, prononcés avec une articulation qui faisait croire que toute l'existence de celui qui prenait la parole dépendait de cette unique et prophétique phrase : « quelqu'un va venir ».
Jon Fosse est entre-temps devenu l'un des auteurs les plus joués sur les scènes internationales. Pourtant, son œuvre qui ne comporte pas seulement des textes pour le théâtre, reste entourée d’un halo incompris.
D’où vient cette lumière blafarde ? Est-il un héritier d’Ibsen qui, hasard ou condition logique, fut directeur de théâtre à Bergen où Fosse a également vécu et travaillé ? Ou est-il quelqu’un qui s’écarte par sa forme radicalement dépouillée d’une tradition qui porte depuis un siècle la marque du grand Norvégien et, bien sûr, d’August Strindberg ?
Leif Zern, critique suédois, ne connaît pas seulement le théâtre. L’évolution des arts plastiques et du cinéma voire des sciences est indispensable pour élucider le lieu et l’étendue de cette œuvre. Grâce à une plume légère et précise, exempte des vanités et fioritures usuelles, on prend un vrai et rare plaisir à la lecture, quitte à comprendre que les textes de Fosse, et au passage le théâtre d’aujourd’hui, reçoivent leur lot d’énergie d’autres sources que théâtrales.