La Maison de Phèdre
Jouer Phèdre sans Phèdre. Dans un futur proche marqué par la guerre et la fermeture de toutes les salles de spectacle, tel est le pari que s’est lancé Anne-Clotilde Rio en mettant en scène le Hippolyte d’Euripide. Il faut bien dire que plus aucune actrice ne semble vouloir incarner un personnage agonisant d’amour pour un homme qui ne l’aime pas, puis qui se donne la mort en inventant un viol fictif pour sceller son ultime vengence. Mais cette ambition n’est pas sans rencontrer de multiples résistances, que ce soit de la part du directeur de théâtre comme de la troupe d’acteurs : si la reine de Trézène s’avère un personnage fantomatique, l’expérience de son absence semble plonger chacun dans un déséquilibre inquiet, voire un deuil profond. En anéantissant Phèdre, Anne-Clotilde n’est-elle pas plutôt en train de s’anéantir elle-même ? Peut-être a-t-elle besoin de sa propre catabase pour parvenir à lancer un regard nouveau sur cette antique héroïne.