Cantus
Aujourd’hui, c’est l’anniversaire du Père. Sa fille Anna le rejoint dans son beau et foisonnant jardin, un gâteau marbré et une assiette-souvenir dans son panier, heureuse de passer un peu de temps seule avec lui. Puis son fils Bjarne arrive, muni d’un excellent porto et d’une assiette-souvenir. Puis Christian, puis Dagrunn, puis d’autres, encore et encore… Les enfants semblent défiler dans une procession cacophonique, répétant sans cesse les mêmes paroles, les mêmes gestes, remémorant au Père les mêmes images tandis que s’amoncellent les mêmes assiettes-souvenirs. Mais comme l’infirmière du Père lui préconise du repos et du calme, on finit par progressivement l’isoler dans sa chambre. Difficile d’établir si ce Père est bien un être de chair ou un souvenir encore frais, auprès duquel chaque enfant vient rendre un dernier hommage empli de reconnaissance et de chaleur avant de communier tous ensemble. Par-delà les répétitions mécaniques et désincarnées des souvenirs lointains vient pointer la spontanéité heureuse de la vie elle-même.